Dans la plupart des pays européens, les mesures édictées par l’Etat pour protéger les personnes âgées ont consisté en l’isolement strict des personnes âgées, soit en institution, soit à domicile. En effet, dans la plupart des pays européens, il est interdit de rendre visite aux personnes âgées en EMS et il est fortement déconseillé aux familles de rendre visite à leur parent âgé à domicile, et de faire garder les petits-enfants par leurs grands-parents.
Le fort taux de mortalité dans les maisons de retraite est une préoccupation qui touche tous les pays européens et a été largement traité dans la presse, car elle est évidemment mal vécue par les familles.
France
la presse française relate que de nombreuses familles ont porté plainte contre certains EMS privés qui ont caché la propagation de la maladie et l’ont mal gérée, laissant les familles sous le choc à l’annonce du décès de leur parent. Un dépistage systématique des résidents et du personnel infirmier dès l’apparition d’un cas a été ordonné par le ministre de la santé.
Suède
En Suède, c’est le gouvernement (le premier ministre Stefan Lövden) qui accuse les familles d’égoïsme, certaines n’ayant pas suivi les recommandations de l’État de ne pas rendre visite aux personnes âgées en EMS. Etant donné la forte propagation du virus dans les EMS suédois, plusieurs politiciens ont estimé que les visites auraient dû être interdites immédiatement et non laissées à la bonne appréciation des familles. Selon le chef de l’opposition suédoise, Ulf Kristersson, le manque d’équipement de protection et de tests pour le personnel soignant est aussi en cause. Il souligne aussi que le personnel soignant, généralement issu de l’immigration, est peu rémunéré, certains cumulant plusieurs emplois temporaires avec de fréquents contacts. Ils sont amenés à travailler même s’ils sont malades, ne recevant pas d’indemnités.
Hollande
Ces mesures d’isolement sont difficiles aussi bien pour les proches que pour les personnes âgées. En effet, la presse souligne la souffrance qu’engendre cette séparation physique pour les proches. En Hollande, par exemple, bien que peu nombreuses, certaines familles ont assisté au décès de leur parent âgé via iPad. Ce doute est une douleur qui s'ajoute au deuil. En période de confinement, les enterrements à huis-clos sont également difficiles à vivre pour les familles.
Allemagne
En Allemagne, certains parents n’ont pas du tout respecté ces mesures et ont fait garder leurs enfants par les grands-parents malgré les recommandations des médecins. Selon une étude réalisée par l’Institut allemand de la jeunesse (DJI), 18 % des enfants fréquentant usuellement la garderie, 13 % des enfants à l’école primaire et 7 % des enfants au premier cycle du secondaire ont été pris en charge par leurs grands-parents pendant la période de confinement. A l’exception de ces cas, minoritaires, l’isolement des personnes âgées comme mesure de protection est relativement respecté.
Suisse
Cette mesure d’isolement a eu pour conséquence de générer un fort sentiment de solitude du côté des personnes âgées. En Suisse, les personnes âgées interviewées par voie de presse préfèrent voir leur petits-enfants plutôt que de mourir de solitude. Ils aimeraient avoir le droit de prendre des risques, quitte à mourir plus rapidement. Ils veulent reprendre leur vie sociale d’avant, qu’ils qualifient de riche. L’engorgement des hôpitaux a été évité et ils ne veulent pas que toute l’économie et l’avenir des jeunes soient pénalisés pour les protéger. Pour contrer cette solitude au sein des EMS, le personnel soignant propose aux résidents, en les aidant, et à leur famille d’utiliser des tablettes, ce qui leur permet de rester en contact visuel. La presse a fait mention de l’utilisation des tablettes dans ces institutions aussi bien en Suède, en Hollande, en France qu’en Suisse.
Hollande et France
Par ailleurs, des initiatives privées (associations) se sont développées pour maintenir le contact avec les personnes âgées comme la mise en place d’heures d’ouverture pour les personnes âgées dans les supermarchés, ou encore l’envoi de cartes postales dans les EMS et à domicile, etc. C’est notamment le cas en Hollande et en France.
Depuis la fin avril (période de pré-déconfinement), les mesures concernant les personnes âgées se sont assouplies.
Pays-Bas
Les visites en EMS sont à nouveau permises mais avec des conditions très strictes. Un seul membre de la famille est autorisé à pénétrer dans l’établissement. La presse hollandaise relate la difficulté pour les personnes âgées de choisir le membre de la famille – entre le conjoint ou l’un des enfants adultes – qui pourra désormais lui rendre visite.
France
Les EMS peuvent, si c’est possible, ouvrir leurs portes à la famille. Ceci dit, certains EMS ne sont pas prêts (pas de masques, pas de surblouses, pas de gel pour les visiteurs). Lorsque les conditions le permettent, les visites se passent derrière une fenêtre en plexiglas, sans contacts physiques, ni don d’objet et ne dure qu’une demi-heure. Les familles doivent rédiger une demande de rendez-vous à l’EMS qui répond en précisant la procédure. Dans la presse, plusieurs enfants adultes témoignent de l’état dégradé de leur parent, le manque de contacts ayant accéléré parfois la dégradation physique et psychique. Certains enfants dont les parents ont Alzheimer préfèrent repousser leur visite à plus tard, ces derniers ne comprendraient pas l’absence de contacts physiques, qui pourrait provoquer une grande anxiété.
L'Observatoire des familles de l’Université de Genève étudie les conséquences du confinement sur la vie des familles et les mesures prises par plusieurs Etats pour les soutenir dans leur vie quotidienne. Cette étude exploratoire se fait à travers l’analyse de la presse de huit pays européens (Allemagne, Angleterre, France, Italie, Pays-Bas, Russie, Suède et Suisse)
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